Biodiversité sur le terrain des Viviers : la santé grandeur nature
Les travaux de construction du Nouvel Hôpital sur le terrain des Viviers ont été entamés avec l’aménagement d’un vaste parc vert et boisé à l’Ouest du site. Chose assez inhabituelle, puisque la construction d’un hôpital précède généralement les aménagements extérieurs… Or il fallait ici tenir compte des caractéristiques inhérentes au terrain : site de haut intérêt biologique, la préservation de la biodiversité sur le terrain des Viviers s’est installée au cœur du processus et est devenue une priorité. Mais aussi un atout : cet environnement naturel est considéré par l’hôpital comme un véritable outil thérapeutique.
Aux balbutiements du projet, le Grand Hôpital de Charleroi a confié à la Faculté d’Agronomie de Gembloux (Gembloux Agro-Bio Tech, ULg) la mission de réaliser une vaste étude et de prévoir un phasage des travaux utiles au respect et à la préservation de la biodiversité du terrain.
L’étude a révélé la présence de populations de 36 espèces protégées. Ces espèces vivant dans trois grands types d’habitat, le projet d’aménagement en a donc tenu compte en prévoyant la création ou la reproduction de ces zones à l’Ouest du site (où se trouve désormais le parc, le Nouvel Hôpital étant construit à l’Est).
Les trois types d’habitats reproduits sur le terrain des Viviers :
1. Zone humide permanente avec roselière
2. Milieux herbeux et pelouses rares sur schistes avec mares/flaques temporaires (en mosaïque) :
3. Végétation arbustive/fourrés :
Aménagement d’espaces favorables aux crapauds calamites et nivellement du terrain
Ces objectifs demandaient un phasage précis des travaux : aménager le parc à l’Ouest du site était une chose, encore fallait-il limiter au mieux les nuisances pour les populations présentes dans cette zone.
Des barrières à crapauds ont notamment été aménagées de sorte que la population de calamites puisse chaque fois migrer vers une partie du site non affectée par les travaux sans possibilité de retour (de nombreuses buttes permettant de franchir la barrière, mais seulement dans un sens). Plusieurs opérations de déplacement des pontes et des têtards ont été organisées par la suite grâce à l’aide de volontaires parmi les membres du personnel du GHdC et sous la supervision de Gembloux Agro-Bio Tech).
Parallèlement, pas moins de 156.000 m³ de terre ont été répartis sur le terrain pour recréer une nouvelle topographie agréable tant pour les riverains que pour les futurs bénéficiaires du parc.
Côté Ouest (parc) et tout autour de la zone consacrée à l’hôpital, les nivellements créent de nombreux vallons où s’installent, dans les parties basses, des plans d’eaux, des flaques temporaires et des petites ornières nécessaires à la survie du Crapaud calamite, du Triton Alpestre et du Triton Ponctué. Les mares temporaires sont connectées entre elles par de nombreux crapauducs.
Les parties hautes sont ponctuées de nombreux arbres et constituent quant à elles un écran végétal pour les riverains.
Une zone humide permanente a également été créée pour accueillir le Bruant des Roseaux et développer la biodiversité du site (une roselière existante sur le terrain y a été partiellement déplacée).
Dans son étude, Gembloux Agro-Bio-Tech avait préconisé le maintien constant, au fil des travaux, de 7 Ha d’espaces ouverts pour la préservation des espèces protégées. Ceci a été respecté pour les différentes phases du chantier.
Sur les 17 Ha que compte le terrain des Viviers, 11 Ha sont consacrés au parc et à la biodiversité.
Plantation d’arbres et récoltes de semences
En tout, 1170 arbres différents ont été plantés à l’Ouest et autour de l’emplacement du futur hôpital. Les pins sylvestres, dont les épines persistantes constitueront un écran végétal permanent, ont été plantés en premier, tandis que des essences non persistantes (peupliers, prunus et saules principalement) complètent le tableau avec leur feuillage contrastant au fil des saisons. Le Bureau Bas Smets, en charge de l’aménagement paysager du site, a fait valider le choix des essences par le DNF (Direction Nature et Forêt – SPW). Il était primordial que ce choix respecte la biodiversité du site, et les essences ont aussi été choisies pour leur résistance, leurs qualités esthétiques et… parce qu’elles ne provoquent pas d’allergies.
Par ailleurs, des semences d’espèces végétales d’intérêt (C. erythrea, V. blattaria, E. helleborine) ont été récoltées pour être replantées dans cet écrin de verdure. Elles serviront également à la création de toitures végétalisées (0,3 Ha de toits du futur hôpital seront verts).
BiodiverSanté : quand la biodiversité devient thérapeutique
Un hôpital dans un tel environnement naturel, c’est rare. Et au niveau thérapeutique, c’est une chance, une belle opportunité. Le GHdC voit la santé grandeur nature et travaille également à la valorisation de la biodiversité en tant qu’atout thérapeutique : il veut offrir aux patients et aux visiteurs tout le bénéfice d’un environnement naturel, sain et ressourçant.
Convaincus que santé et biodiversité ont un avenir commun, le Grand Hôpital de Charleroi et Gembloux Agro-Bio Tech unissent leurs expertises au nom de la BiodiverSanté. Un colloque du même nom était organisé le 27 mai 2016. La réflexion portait sur le maintien de la biodiversité, sur les bienfaits de celle-ci sur notre santé, et sur la façon d’articuler au mieux ces deux notions pour prodiguer des soins complets et optimaux aux personnes malades dans le respect de l’environnement.
Outre les balades bucoliques ressourçantes, l’écrin de verdure présente aussi des possibilités en interactions sensorielles pour la prise en charge de certaines maladies neurodégénératives (Alzheimer), mais aussi pour l’oncologie, la psychiatrie, la pédiatrie, les soins palliatifs… Plus largement, il a été démontré scientifiquement qu’un environnement de soins agréable et intégré dans un lieu vert permet aux patients une meilleure gestion de la douleur et dès lors une moindre utilisation de médicaments : « (…) qu’il s’agisse d’expérience passive – regarder un paysage – ou active, l’amélioration du bien-être ressenti par les patients peut porter sur trois dimensions : physique, psychologique ou spirituelle. (…) la simple vue d’un espace vert depuis la chambre d’hôpital s’avère bénéfique : la durée de séjour, la fréquence des doléances et la consommation d’antalgiques diminuent (…) »[1].
La nature devient dès lors un outil pour le bien-être du patient, tous âges et handicaps confondus. Et en intégrant l’environnement dans une démarche de soins, le GHdC contribue de facto à le conserver durablement.
[1] Préfaces Hubert Reeves, Docteur Pierre Souvet. Notre santé et la biodiversité. Tous ensemble pour préserver le vivant. Editions Buchet & Chastel. 2013